12 janvier 2014

dépénalisation du stationnement


Les collectivités locales ne devraient pas s’arrêter en si bon chemin. Devenue une compétence locale depuis l’adoption de sa dépénalisation dans le cadre du projet de loi [1] de modernisation de l’action publique(1) [2], le stationnement n’est pas encore « au service des usagers » estime le Commissariat général à la stratégie et à la prospective (CGSP), dans un rapport publié mardi 17 décembre.

Conçues comme une ressource envers les autorités locales de transports, les recommandations du groupe de travail présidé par Olivier Paul-Dubois-Taine ont pour objectif de conforter la « nouvelle assise » des politiques de stationnement depuis leur dépénalisation.
Parmi leurs propositions pour refondre les politiques de stationnement:
  • créer un service technique intercommunal de stationnement ;
  • créer une instance intercommunale de concertation et de suivi des politiques locales ;
  • confier à l’autorité locale organisatrice des transports urbains la conception et le suivi des politiques de stationnement à l’échelle de l’agglomération ;
  • concevoir la politique de stationnement à l’échelle du bassin de mobilité, en étroite liaison avec l’organisation des déplacements urbains et la valorisation de l’espace public local ;
  • adapter les dispositions du code de la route et du code général des collectivités territoriales (CGCT) ;
  • expérimenter dans des villes-tests des dispositifs innovants de stationnement (notamment les technologies d’organisation et d’information).
Toutes ces mesures viennent préparer l’Après-dépénalisation, vécu comme un bouleversement sur le terrain. « La dépénalisation est l’Acte 1 de la décentralisation du stationnement » se félicite ainsi Denis Rambaud, vice-président en charge des mobilités de Mulhouse Alsace Agglomération.  Comme lui, nombre d’élus locaux se sont satisfaits de cette victoire législative.
Mais face aux usages concurrents (piétons, vélos, voitures en circulation et en stationnement, transports en commun, camions de livraisons, espaces verts, etc…) tous plus légitimes les uns que les autres de la voie publique et à des politiques de stationnement « loin d’être optimales », le CGSP exhorte les collectivités à ne pas seulement se contenter de cette première étape.
Autre progrès à suivre - « La dépénalisation est un premier outil qui permettra un progrès » admet Olivier Paul-Dubois-Taine, « mais il y en a plein d’autres. » A commencer par les moyens de paiement, par exemple, via le smartphone ou l’envoi d’un simple SMS. « En transférant cette compétence aux villes et intercommunalités, nous passons d’un système tout-répressif symbolisé par la verbalisation des ASVP au paiement spontané, à l’usage » estime M. Rambaud, également président de la commission ‘Stationnement’ du Groupement des autorités responsables de transports (Gart [3](2) [4]).
« Le simple fait d’évoluer de la coercition vers un paiement facilité devraient pousser une partie des 60 à 80% automobilistes qui fraudent actuellement à légaliser leur situation » veut croire l’élu alsacien.
« Ce rapport arrive au moment opportun à quelques mois des élections de mars prochain, de nouvelles règles devront être inventées entre communes et agglomérations pour trouver de nouveaux équilibres territoriaux. L’intégration ou non des politiques de stationnement dans les politiques de déplacement doit être l’un des premiers chantiers du prochain mandat » explique Denis Rambaud.

Note 01:
votée par le Sénat comme par l'Assemblée nationale, la dépénalisation du stationnement devrait être définitivement validée par la commission mixte paritaire jeudi 19 décembre prochain -Retourner au texte
Note 02:
Le GART est un organisme qui regroupe 280 collectivités territoriales - Retourner au texte
Note 03:
les objectifs des politiques de stationnement sont nombreux, qu’il s’agisse de fluidifier l’usage de la voie publique, rendre efficace le fonctionnement de la ville et revitaliser le centre-ville, améliorer l’usage rare du foncier en hypercentre ou encore la qualité du cadre de vie urbain, etc... - Retourner au texte


Ambitieux dans ses propositions, le CGSP demeure frileux sur la gouvernance

« Si les collectivités locales veulent atteindre leurs objectifs(3) [5] en matière de stationnement, il leur faut absolument définir un véritable service, et non multiplier les règles comme l’a permis la dispersion des compétences au cours des dernières décennies » met en garde Olivier Paul-Dubois-Taine, ingénieur des Ponts et Chaussées honoraire.

Géopolitique du stationnement - Alors que la vision d’ensemble des plans de déplacements urbains portée par l’agglomération s’heurte régulièrement au point de vue concret du maire – titulaire de pouvoirs de police spéciale de circulation et de stationnement entre autres – compétent sur l’aménagement de la voirie et l’occupation de l’espace public local, les experts du CGSP n’ont cependant pas souhaité se mêler de la gouvernance.
Tout juste recommandent-ils de créer « des espaces techniques et politiques de traitement des tensions » afin que la dépénalisation du stationnement ne se résume pas à un simple coup d’épée dans l’eau et que le dialogue puisse s’instaurer. Mais aussitôt, les auteurs du rapport prennent la précaution de signaler que « chaque intercommunalité s’organise comme elle le souhaite, notamment sur la mutualisation ou non des moyens des communes. »

Conflits et tensions nécessaires - De par son expérience d’élu local, Denis Rambaud approuve la création de cette instance de concertation chargée de réfléchir à l’intégration des politiques locales de stationnement dans la politique intercommunale des déplacements urbains : « il existe déjà des tensions entre communes, ainsi qu’entre communes et intercommunalités, mais cette mise sous tension est nécessaire pour faire avancer les choses. »
Selon lui, le transfert des politiques de stationnement à l’intercommunalité n’est même pas à l’ordre du jour. « Les élus municipaux doivent conserver des prérogatives s’ils ne veulent pas devenir de simples boîtes aux lettres, comme les mairies d’arrondissement de Paris, Lyon et Marseille. Il y a d’ailleurs une volonté des agglomérations à ce que le maire puisse continuer son travail de proximité et discuter avec les habitants de sa commune » fait valoir l’adjoint au maire de Mulhouse et vice-président de Mulhouse Alsace Agglomération.


CHIFFRES CLES

  • 95% : c'est le pourcentage de temps où une voiture particulière est à l'arrêt
  • 5 à 10% : c'est la part du trafic en circulation constituée de véhicules en recherche d'une place
  • 2 à 3 : c'est le nombre de places de stationnement que nécessite un véhicule particulier au cours de la journée (domicile, travail, autres destinations)
  • 120 à 300 euros / an : c'est le prix d'un abonnement au stationnement pour les résidents. Pour les visiteurs, il faut compter entre 1 et 4€ l'heure.
  • 1 000 à 2 000 euros / an : c'est le prix d'une location d'un parking privé
  • 17 euros : c'est le prix d'un PV de stationnement, depuis sa hausse en 2011
  • 10% : c'est le pourcentage d'infractions donnant lieu à une verbalisation

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