20 février 2013

politique de la ville : les dernières promesses…


Le gouvernement a assuré mardi 19 février que l'Etat était "de retour" en banlieue et annoncé une série de mesures qui, faute de marge de manoeuvre budgétaire, visent surtout à mieux orienter les moyens existants vers les quartiers en difficultés.



“L’Etat est de retour dans les quartiers. L’Etat républicain est de retour, celui de l’égalité”, a déclaré le Premier ministre Jean-Marc Ayrault à l’issue d’un Comité interministériel des Villes (CIV), qui a rassemblé 20 ministres à Matignon.

Budget constant - Taux de chômage de 22,7%, un tiers des habitants sous le seuil de pauvreté, un quart des jeunes en échec scolaire: les inégalités persistent entre les banlieues et le reste du territoire. “Pire encore, elles ont recommencé à s’accroître depuis une dizaine d’années”, a noté le chef du gouvernement.
Pour autant, pas question de lancer “un plan Marshall des banlieues” ni “un plan de sauvetage miraculeux imaginé dans un cénacle ministériel”, a martelé Jean-Marc Ayrault.

Les 27 mesures adoptées mardi, préparées depuis des mois par le ministre délégué à la Ville François Lamy en concertation avec les acteurs du secteur, se font d’ailleurs à budget constant.
Seule l’expérimentation de 2.000 “emplois francs” sur dix sites en 2013 devrait mobiliser de nouveaux moyens. Il s’agit de subventionner à hauteur de 5.000 euros l’embauche de jeunes des quartiers.

Ajustements - Aucun chiffre n’est ainsi donné pour la poursuite de la rénovation urbaine, bien que le CIV entérine le lancement d’une nouvelle génération d’opérations dès 2014, promesse de campagne de François Hollande.
En revanche, pour éviter le saupoudrage, les crédits spécifiques du ministère de la Ville (500 millions d’euros) seront concentrés sur “un millier de quartiers prioritaires”, contre 2.500 aujourd’hui, selon les conclusions du CIV.
La liste des bénéficiaires sera annoncée en juin. Le gouvernement précédent ayant dû abandonner une telle réforme sous la pression des élus locaux, Jean-Marc Ayrault a tenu à rassurer: “il n’y aura pas de désengagement brutal de l’Etat”.

Surtout, tous les ministres sont invités à orienter une partie de leurs actions vers ces quartiers pour compenser le manque d’enseignants, de policiers ou de médecins. Sur le front de l’emploi, 30% des emplois d’avenir doivent bénéficier à des habitants de zones urbaines sensibles (ZUS), tout comme 25% des services civiques, selon le CIV.

Les banlieues difficiles doivent aussi bénéficier en premier de la scolarisation des enfants de moins de trois ans et de l’embauche de nouveaux enseignants.

En matière de sécurité, des référents police-population et des intervenants sociaux en commissariat, si possible expérimentés, seront embauchés dans les zones de sécurité prioritaire. A terme, l’accès des jeunes des quartiers sensibles aux différents métiers de la sécurité intérieure devra par ailleurs être amélioré.
Comme annoncé précédemment, le fonds interministériel pour la prévention de la délinquance (FIPD) sera prioritairement mobilisé dans les quartiers cibles de la politique de la Ville. La future stratégie nationale de prévention de la délinquance 2014-2020 sera, elle, déclinée dans les contrats de ville.

Impatience - Cette “mobilisation du droit commun” a été prônée par nombre des prédécesseurs de François Lamy, mais est souvent restée de l’ordre des voeux pieux. Pour éviter cet écueil, le ministre a préparé avec ses collègues dix conventions trisannuelles qui fixent noir sur blanc des objectifs chiffrés, assortis d’un calendrier.
A l’autre bout de la chaîne de décision, les acteurs locaux sont aussi priés de monter à bord. Les futurs contrats de ville seront ainsi signés avec les préfets, les élus, mais aussi le recteur d’académie, la caisse d’allocation familiales ou Pôle Emploi.
Ces contrats uniques, au niveau des intercommunalités et non plus des mairies, devraient être signés après les municipales de 2014.

En attendant, les habitants des quartiers populaires, qui avaient massivement voté pour François Hollande, pourraient s’impatienter. “Le changement commence à se faire attendre”, notait lundi Mohamed Mechmache, le président du réseau AC Le Feu né après les émeutes urbaines de 2005.

Les principales mesures pour les banlieues

Emploi
  •  réserver 30% des emplois d’avenir et 25% des services civiques pour les jeunes des quartiers défavorisés.
  • expérimenter 2.000 “emplois francs” en 2013 sur dix sites (dont Clichy-Montfermeil, Amiens, Grenoble et Marseille). Une subvention de 5.000 euros sera versée aux entreprises embauchant en CDI un jeune issu de ces quartiers.
  • évaluer le bilan des zones franches urbaines (ZFU) critiquées pour les effets d’aubaine qu’elles génèrent, d’ici la fin 2013.
  • présence de Pole Emploi dans tous les quartiers sensibles (ce n’est pas le cas aujourd’hui à Amiens-Nord notamment).
Education, Santé, Police
  •  donner la priorité aux villes de banlieue dans la scolarisation des moins de trois ans et le déploiement de nouveaux enseignants
  • encourager l’offre de soins primaires
  • créer un référent police-population et un intervenant social en commissariat par zone de sécurité prioritaire
Lutte contre les discriminations
  • le ministre délégué à la Ville François Lamy est chargé d’une mission interministérielle sur le sujet qui doit notamment permettre de mettre en place un baromètre annuel des discriminations
  • Célébrer les 30 ans de la “Marche pour l’égalité” de 1983, plus connue comme Marche des Beurs
Rénovation urbaine
  • terminer le plan national de rénovation urbaine (PNRU) lancé en 2003, qui devait se terminer au 31 décembre, mais qui n’est qu’à 79% engagé. La date-butoir est reportée à fin 2015 pour permettre à tous les projets d’aller à leur terme.
  • lancer “une nouvelle génération d’opérations” sur une liste définie par l’Etat de quartiers prioritaires. Aucun montant n’est précisé pour le financement de ces travaux.
Réformes techniques
  • la réforme de “la géographie prioritaire”: concentrer les crédits de la politique de la Ville (505 millions en 2013) sur un millier de quartiers, contre 2.500 actuellement. La liste, qui pourrait susciter des grincements de dents chez les élus locaux, sera connue en juin.
  • la création d’un contrat de ville unique (pour remplacer les différents contrats qui, au niveau local, portaient sur le volet social, sécurité, rénovation urbaine…) au niveau de l’intercommunalité (et non plus de la commune)
  • “rapprocher” l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances (Acsé, qui finance les associations dans les quartiers) et le secrétariat général du CIV. Le personnel de l’Acsé s’est déjà élevé contre cette fusion.
  • favoriser la concertation avec les habitants. Une mission est en cours pour définir les modalités d’action. La copie sera rendue en juin.
  • faciliter le travail des associations, en privilégiant des financements pluriannuels et en simplifiant les demandes de subventions.
REFERENCES

  • Discours de clôture de Jean-Marc Ayrault, lors du Comité interministériel des villes organisé le 19 février 2013
  • Relevé de décisions prises lors du Comité interministériel des villes organisé le 19 février 2013
  • Synthèse du Comité interministériel des villes organisé le 19 février 2013

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