27 février 2014

La tendance des villes autosuffisantes

c537_incredible_edible_todmorden_france_paris_hotel-de-ville_incroyables_comestibles_w1400Enquête sur un véritable phénomène de société : "La tendance des villes autosuffisantes"par le site du développement durable et de la nouvelle consommation consoGloble. Dernièrement, on note une envie croissante de la population à consommer local, à privilégier les circuits courts et à s’approvisionner en réduisant les distances. Dans son sillage, émerge une volonté – utopique ? – de développer des villes autosuffisantes. Alors, est-il vraiment possible pour une ville d’être auto-suffisante, voire en autarcie ? N’est-il pas vain de croire que l’on peut y arriver ? Enquête sur ces villes qui tendent vers l’autosuffisance.


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Publié le 26 février 2014francois rouillay 
L’autosuffisance, c’est quoi ?
La ville de Todmorden a pour objectif depuis 2008 de parvenir à l’autonomie alimentaire d’ici à 2018. Pour aider ses habitants durement touchés par la crise économique, elle fait cultiver toutes les parcelles de terre disponible. C’est de là qu’est née le mouvement des Incroyables Comestibles qui visent à l’autosuffisance.
Le terme revêt plusieurs aspects qu’il paraît important de détailler. Car être autosuffisant ne concerne pas seulement l’alimentaire, comme on a parfois coutume de le penser. La notion d’autosuffisance fait partie des concepts géopolitiques et géostratégiques qui s’opposent à la globalisation ou à la mondialisation des marchés commerciaux de l’approche dite «libérale» de spécialisation de chacun sur le métier qu’il maîtrise le mieux.
Elle distingue les grandes approches économiques du point de vue de la dépendance – indépendance vis à vis des ressources vitales ou jugées stratégiques pour les individus ou la collectivité. L’autosuffisance doit intervenir sur plusieurs niveaux.
Autosuffisance énergétique
L’«indépendance énergétique», elle, est obtenue en associant les économies d’énergie et l’efficience énergétique aux énergies renouvelables, propres et sûres (éolien, solaire, géothermie etc.).
Selon l’Insee, le taux d’indépendance énergétique est le résultat du rapport entre la production nationale d’énergies primaires (charbon, pétrole, gaz naturel, nucléaire, hydraulique, énergies renouvelables) et la consommation en énergie primaire, sur une année donnée. Il était en 2010 de 51.2 % pour la France en 2010 selon les calculs de l’Insee.
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Autosuffisance alimentaire
C’est la possibilité pour un pays de subvenir aux besoins alimentaires de son peuple par sa seule et propre production. Celle-ci s’obtient notamment en privilégiant les filières courtes de production ainsi que les filières locales.
Autosuffisance financière
Être auto-suffisant au niveau financier implique d’éviter la dépendance aux emprunts extérieurs. Il est possible dans ce cas, de s’appuyer sur la micro-finance.
Autosuffisance médicale
Par exemple, en ce qui concerne les vaccins, les médicaments disponibles contre une pandémie ou les moyens chirurgicaux.
Autosuffisance en matière de défense
Cela implique de ne plus importer en matière d’armement et de pouvoir assurer la défense de son pays, avec les moyens de production assis sur le territoire. L’autosuffisance est également exprimée en philosophie comme un idéal d’indépendance « spirituelle » ou « morale ». C’est d’ailleurs un enseignement que dispensait Diogène de Sinope dans le cadre du mouvement cynique.
Indépendance et développement soutenable
Certains, comme Hermann Scheer, député allemand, prix Nobel alternatif de 1999, considèrent l’autosuffisance (au moins concernant les ressources vitales) comme un des éléments nécessaires au développement soutenable et à la paix.
Selon lui, cela évite les conflits pour l’accès aux ressources difficilement ou coûteusement renouvelables (tel que le bois par exemple) ou le règlement de la dette des pays pauvres. A noter que l’autosuffisance n’exclut pas les échanges dans les domaines de la culture, de la communication, de la coopération ou encore de la gestion collaborative de ressources partagées.
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L’autosuffisance de villes nourricières
Être autosuffisant permet de réduire l’empreinte énergétique, d’une part, en privilégiant des énergies renouvelables et d’autre part, de limiter l’impact écologique, en limitant voire stoppant les exportations (transport aérien, bateau etc.). Cela implique une réduction de la pollution et une limitation des émissions de gaz à effet de serre. Et par conséquent, une bonne mesure pour lutter contre le réchauffement climatique. Aujourd’hui, l’accent est mis prioritairement surl’autosuffisance alimentaire.
Nourrir les villes, un enjeu majeur d’ici 2050
Le défi est de taille : il faut doubler la production alimentaire mondiale d’ici à 2050 pour nourrir9 milliards d’humains. Or, face à une démographie croissance d’une planète qui est en majorité urbaine, la question de l’approvisionnement en nourriture préoccupe les métropoles.En France, il y aura 10 millions d’habitants à nourrir en plus.
C’est pourquoi des études prospectives ont été menées à Rennes et Paris pour évaluer le potentiel de ces villes potentiellement «nourricières». Toulouse est une des premières villes à avoir introduit le concept de la ville nourricière. À Toulouse, l’une des premières villes a vouloir concrétiser l’idée de culture urbaine, le  collectif Toulouse en transition expérimente la culture artificielle en toit.
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Rennes, ville autosuffisance ?
D’après l’étude menée en 2010 par les étudiants d’AgroCampus Ouest, la moitié des habitants Rennais seraient intéressée pour participer à la production locale de leur alimentation. Les étudiants ont donc questionné le niveau de la production (plus économe, écologique, mobilisant plus d’espaces verts disponibles) et le niveau de la consommation (moins carnée, moins gaspilleuse) pour tendre vers l’autonomie.
Résultat : les terres de Rennes Métropole permettraient de couvrir près de 40% des besoins. Augmenter les surfaces des jardins privés et publics (de 15 à 40%), des forêts (cultivées à 30%) et des espaces verts urbains (utilisés à 46%) permettrait de « produire cinq fois la demande en fruits et légumes ».
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L’écopastoralisme ou écopâturage qui fait son retour dans les grandes villes. Pour Paris, une volonté d’autosuffisance impliquerait le retour de l’élevage en Ile-de-France d’ici à 2030. Ceci dans le but de retrouver une complémentarité entre culture et élevage. A noter que ces changements n’engendreraient pas forcément une chute de productivité, selon une étude parue fin 2011. « Par contre, cela implique une modification du régime alimentaire : les protéines végétales doivent se substituer pour moitié aux protéines animales« , souligne le Gilles Billen, directeur de recherche au CNRS.
Des projets innovants pour développer l’agriculture urbaine
De nombreux projets émergent aux États-Unis, au Canada, au Japon ou encore en Chine. Des fermes urbaines verticales ou mobiles sont ainsi développées. En quoi cela consiste ? Ces fermes, plantées à l’intérieur des villes, présenteraient la possibilité de mettre en place unefilière intégrée.
  • En Espagne, les habitants de la ville de Vitoria-Gasteiz, dans le pays basque espagnol, ont tous accès à un  jardin public dans un rayon de 300 mètres et ils peuvent cultiver leurs légumes sur 210 parcelles bio.
  • À Münich, un projet de 2009, Agropolis, vise l’approvisionnement alimentaire de la capitale bavaroise ; cela comprend la production, le traitement, le transport en tram et la vente de fruits et légumes. Ces cultures ont même vocation à s’implanter sur les terrains du futur quartier Munich-Freiham : toutes les parcelles libérées par les travaux peuvent être cultivées par les habitants.
  • À Totnes, officiellement « ville en transition » en Angleterre, tout est fait pour transformer l’économie de la ville : sur le plan alimentaire, un programme de plantation de noyers et d’oléagineux a été lancé afin de nourrir les habitants et fournir les industriels.
  •  À Paris, les toits végétalisés se multiplient, comme celui de 7.000 m2 à Beaugrenelle. Le projet Vergers Urbains veut essaimer les arbres fruitiers dans la ville. Paris compte déjà plus de 80 jardins communautaires.
Cultures hydroponiques en pleine ville
C’est la possibilité de développer des cultures hydroponiques, des cultures sans terre en mode ultra-urbain qui enflamme les imaginations et donne naissance à de nombreux projets. Après New-York qui installe des fermes sur des toits, l’Asie et notamment Singapour montrent la voie de cultures urbaines.
À chaque étage des bâtiments, une étape de la production alimentaire serait représentée. Des fermes qui permettent donc une production de A à Z. Et la France n’est pas en reste. En 2005, l’agence d’architecte SOA, lance le concept de « tour vivante« .
Le projet mêle agriculture, logements et bureaux. Aujourd’hui, l’agence entend concrétiser d’ici à 2015 son projet de serres greffées sur les toits de la cité d’habitation Marcel Cachin àRomainville (93).
L’étude de faisabilité a été lancée en 2012. Cette ferme horizontale dotée de 1.500 m2 de cultures produirait des fruits et légumes consommables directement sur place par les habitants, selon un système de vente en circuit-court à définir (paniersAMAP, marché…).
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Nantes, et le mouvement "Slow Food"
En 2011, l’agence de designers Faltazi a lancé le projet Les « Ekovores » pour produire et consommer local, limiter l’usage du pétrole dans la ville et favoriser le compostage.Et cela comme l’explique Victor Massip, un des fondateurs de l’agence il s’agit de devenir locavores «sans pour autant que ce soit régressif ».
Et Faltazi ne s’arrête pas là : d’autres projets tels que les barges-potagers sur les rives de la Loire, les poulaillers urbains, les jardins flottants ou encore les conserveries de quartierssont développés.

L’objectif ?

Équiper les quartiers fermiers et valoriser la production maraîchère. Ainsi, un projet decomposteur est prévu d’ici 2014 dans un quartier à Nantes en partenariat avec l’association Compostri. Laurence Lebot, co-créatrice de l’agence indique cependant qu’ »il est difficile de réaliser les prototypes et de trouver les moyens de les financer. Ça avance lentement ». Elle en appelle donc à plus « de volonté politique ». Une des difficultés pour avancer vers l’autosuffisance.
Être autosuffisant, pas si facile que ça !
Être auto-suffisant implique souvent une protection de la ressource ou d’un marché, rendue difficile par les règles de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce). De plus, les tenants de l’approche libérale et du marché global avancent qu’il n’est pas toujours possible d’être auto-suffisant, surtout sur le plan alimentaire.
C’est le cas notamment pour les zones désertiques, après une guerre ou après une catastrophe naturelle ou industrielle. Malgré les volontés, nombreux sont donc les éléments à maîtriser avant d’arriver à rendre une ville autosuffisante.
Source : ConsoGlobe ICI.
Si l’enquête de consoGlobe conclut qu’être autosuffisant ce n’est pas si facile que ça, les citoyens jardiniers solidaires pensent au contraire que c’est simple à réaliser. Pourquoi ? Parce que la Terre nourricière est généreuse et que les temps sont mûrs pour que les habitants se réapproprient leur nourriture dans le partage et les coopérations solidaires. Ce que Todmorden a réalisé en quatre ans, il est aujourd’hui possible de le faire en 10 mois, le temps d’une saison et de la récolte. Les démarches participatives solidaires des Incroyables Comestibles ont démarré dans plus de 250 communes de France. Plusieurs collectivités locales sont à présent motivées pour rejoindre le calendrier Incredible Edible Todmorden qui vise à atteindre l’autosuffisance alimentaire en 2018. Les résultats de production apportées par les techniques révolutionnaires de permaculture changent la donne aujourd’hui. Si vous ajoutez à cela l’engagement des habitants fait le choix conscient de manger local, éthique et solidaire, c’est toute la réalité quotidienne qui change de décor. On parle alors de changement de paradigme. Il faut le voir pour le croire, c’est là, l’abondance est un état naturel, elle est là, elle a toujours été là, mais on l’a oublié. L’éveil des consciences à grande échelle rend cette métamorphose des territoires possible !
Si vous souhaitez faire la visite et découvrir la Green Route de la co-création vivante dans le ici et maintenant au sein du processus de l’abondance partagée des incroyables comestibles sur le site, vous êtes cordialement invités à entrer par la grande porte, vous y êtes attendus en fête par les enfants qui ont préparé votre venue avec les citoyens jardiniers – cuisiniers – musiciens des Nouveaux Territoires du Nouveau Paradigme. L’entrée se situe là où tout à commencé, c’est-à-dire à Todmorden, au Royaume-Unid’Angleterre.

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