150 à 300 Roms la squattaient depuis octobre 2012. L’usine désaffectée du VIIIe arrondissement de Lyon a pris feu ce lundi, tuant au passage deux femmes et un enfant. « C’est le douzième incendie d’une habitation rom depuis le début de l’année, résultat d’une politique imbécile du gouvernement qui consiste à chasser sans fin ces populations », s’est indigné Laurent El Ghozi, fondateur du collectif Romeurope, dans les colonnes du Monde. Les associations dénoncent notamment la non-application de la circulaire du 26 août 2012, censée encadrer les expulsions de Roms et lever partiellement les restrictions à l’emploi de ces populations.
Pourtant, certaines collectivités font des efforts. La Commission européenne a recensé sur une carte interactive repérée par la Gazette des communes, les régions, villes ou communes qui se sont engagées à « intégrer leur population rom » en s’adossant à des programmes européens d’échange de bonnes pratiques, de sensibilisation ou d’accès aux financements.
Les villes européennes engagées dans des programmes européens pour favoriser l’intégration des Roms. Le détail de ces programmes est à retrouver ici
En France, 32 collectivités sont ainsi décomptées. Mais que font concrètement ces villes ? Agissent-elles pour l’intégration des Roms et comment ? Voici quatre exemples.
Aubervilliers : la pionnière du village d’insertion
Si la France compte 15 000 à 20 000 personnes dites « roms », la moitié vivent en Ile-de-France, dont une grande majorité en Seine-Saint-Denis. C’est donc très naturellement là que les premiers gros aménagements ont vu le jour. C’est à Aubervilliers que le premier village d’insertion est sorti de terre, financé par les deniers de la ville, la communauté d’agglomération et la région. C’était en 2007 et il était prévu d’y accueillir une vingtaine de familles roms. D’autres communes du département (La Courneuve, Bagnolet, Saint-Denis, Saint-Ouen…) lui emboîtèrent le pas. « C’était mieux pour les familles d’être dans ces algecos, de pouvoir manger, être propre. Mieux que ces bidonvilles crasseux dont ils risquaient d’être délogés tous les trois mois », concède Laurent El Ghozi. Contre le droit d’habiter dans ces villages, les familles s’engagent à rester dans le droit chemin, à scolariser leurs enfants, à suivre des formations pour décrocher un emploi.
Pourtant, très vite, les critiques fusent. « On a pris des gens qui vivaient dans des maisons depuis des années, qui n’étaient pas nomades du tout et on les a fait habiter dans des caravanes », précise le confondateur de RomEurope qui critique aussi le mode – très arbitraire – de choix des familles logées sur ces sites. Pis, ces villages s’avèrent de véritables prisons : gardés par des vigiles, avec des visites limitées. « La finalité réelle de ces projets est le contrôle et la surveillance d’une partie des Roms migrants originaires de Roumanie et de Bulgarie, quand la partie restante, la majorité, est condamnée à courber l’échine sous la matraque et s’en aller », exposait le collectif La Voix des Rroms dans un billet publié en 2010. Et les horizons sont maigres. « La seule façon de sortir, c’est d’avoir des ressources donc un travail et un titre de séjour sur le territoire français », précise Laurent El Ghozi. Depuis, les choses se sont un peu améliorées : « Les responsables ont fait entrer d’autres populations SDF, ont dépassé les caractères ethniques », poursuit-il.
Montreuil : faire entrer les Roms dans le droit commun
En 2010, la ville a créé une Mous, soit en décodé une maîtrise d’œuvre urbaine et sociale. Elle assure un hébergement d’urgence sur deux sites d’accueil équipés d’eau et d’électricité mais moins fermés que les traditionnels villages d’insertion. Elle prévoit aussi des logements modulaires pour accueillir onze familles – un programme qui suscite encore l’opposition d’une partie de la population. Surtout, ce dispositif qui s’adresse à 350 personnes « vise à faire entrer les migrants dans le droit commun », précisait Les Inrockuptibles en mars : accès à la Couverture maladie universelle ou à l’Aide médicale d’Etat, scolarisation des enfants, accompagnement vers l’emploi et l’obtention d’un logement. Là encore, les perspectives de travail manquent. Des ateliers emploi ont bien été mis en place et une quinzaine d’autorisations provisoires de séjour ont ouvert droit à l’emploi. Mais le retour au pays est envisagé : « Suite à un voyage sur place en septembre 2012, municipalité et associations réfléchissent à un système de “coopération décentralisée”. Des accords entre collectivités territoriales permettraient alors aux Roms, citoyens roumains, de monter des projets professionnels… dans leur propre pays », précise Les Inrockuptibles. « On peut reconnaître que Dominique Voynet a essayé de faire quelque chose. » Même si la Mous « ressort plus de la charité que de la solidarité républicaine », rajoute Juliette Prados, une élue locale (Parti de Gauche) dans les colonnes de l’hebdomadaire.
Orly : impliquer les populations dans la construction de leur habitat
En 2011, « avec l’appui du Conseil général, la mairie a installé sur des terrains des maisons en bois plus ou moins auto-construites et organisé un accompagnement des populations. Il y a une volonté de faire des choses », souligne Laurent El Ghozi de RomEurope. Le département du Val-de-Marne a en effet financé des maisons en kit basse consommation pour 17 familles sur un terrain prêté par la mairie pour au moins trois ans. Ces 75 personnes auraient été sélectionnées parmi les 150 habitants des bidonvilles insalubres d’Orly et de Villeneuve-le-Roi, selon un critère d’ancienneté.
Lyon : contre la ghettoïsation
C’est là que le drame s’est passé et pourtant. « Avant le changement de gouvernement, le préfet a accepté avec une relative bienveillance – je dis bien relative – les demandes de travail (1). Et l’association Alpil (Action pour l’insertion par le logement, ndlr) s’est battue pour que les populations accèdent à un logement en diffus. C’est-à-dire que les gens soient logés dans du logement social. Lyon prouve que c’est possible avec la conjonction de la bonne volonté du préfet et de quelques employeurs qui ont besoin de cette main-d’œuvre », souligne Laurent El Ghozi. La ville essaimera-t-elle ces embryons de bonnes pratiques ? En tout cas, elle fait partie de l’Alliance européenne des villes et des régions pour l’inclusion des Roms qui permet aux collectivités d’échanger autour de leurs expériences et pratiques.
(1) Contrairement aux autres populations européennes, ces deux nationalités sont en effet soumises à un régime transitoire jusqu’à la fin de l’année. Aussi pour employer un Roumain ou un Bulgare, un employeur doit-il obtenir [une autorisation auprès de la Préfecture. Les associations dénoncent la longueur du traitement des dossiers par la préfecture.
Pourtant, certaines collectivités font des efforts. La Commission européenne a recensé sur une carte interactive repérée par la Gazette des communes, les régions, villes ou communes qui se sont engagées à « intégrer leur population rom » en s’adossant à des programmes européens d’échange de bonnes pratiques, de sensibilisation ou d’accès aux financements.
Les villes européennes engagées dans des programmes européens pour favoriser l’intégration des Roms. Le détail de ces programmes est à retrouver ici
En France, 32 collectivités sont ainsi décomptées. Mais que font concrètement ces villes ? Agissent-elles pour l’intégration des Roms et comment ? Voici quatre exemples.
Aubervilliers : la pionnière du village d’insertion
Si la France compte 15 000 à 20 000 personnes dites « roms », la moitié vivent en Ile-de-France, dont une grande majorité en Seine-Saint-Denis. C’est donc très naturellement là que les premiers gros aménagements ont vu le jour. C’est à Aubervilliers que le premier village d’insertion est sorti de terre, financé par les deniers de la ville, la communauté d’agglomération et la région. C’était en 2007 et il était prévu d’y accueillir une vingtaine de familles roms. D’autres communes du département (La Courneuve, Bagnolet, Saint-Denis, Saint-Ouen…) lui emboîtèrent le pas. « C’était mieux pour les familles d’être dans ces algecos, de pouvoir manger, être propre. Mieux que ces bidonvilles crasseux dont ils risquaient d’être délogés tous les trois mois », concède Laurent El Ghozi. Contre le droit d’habiter dans ces villages, les familles s’engagent à rester dans le droit chemin, à scolariser leurs enfants, à suivre des formations pour décrocher un emploi.
Pourtant, très vite, les critiques fusent. « On a pris des gens qui vivaient dans des maisons depuis des années, qui n’étaient pas nomades du tout et on les a fait habiter dans des caravanes », précise le confondateur de RomEurope qui critique aussi le mode – très arbitraire – de choix des familles logées sur ces sites. Pis, ces villages s’avèrent de véritables prisons : gardés par des vigiles, avec des visites limitées. « La finalité réelle de ces projets est le contrôle et la surveillance d’une partie des Roms migrants originaires de Roumanie et de Bulgarie, quand la partie restante, la majorité, est condamnée à courber l’échine sous la matraque et s’en aller », exposait le collectif La Voix des Rroms dans un billet publié en 2010. Et les horizons sont maigres. « La seule façon de sortir, c’est d’avoir des ressources donc un travail et un titre de séjour sur le territoire français », précise Laurent El Ghozi. Depuis, les choses se sont un peu améliorées : « Les responsables ont fait entrer d’autres populations SDF, ont dépassé les caractères ethniques », poursuit-il.
Montreuil : faire entrer les Roms dans le droit commun
En 2010, la ville a créé une Mous, soit en décodé une maîtrise d’œuvre urbaine et sociale. Elle assure un hébergement d’urgence sur deux sites d’accueil équipés d’eau et d’électricité mais moins fermés que les traditionnels villages d’insertion. Elle prévoit aussi des logements modulaires pour accueillir onze familles – un programme qui suscite encore l’opposition d’une partie de la population. Surtout, ce dispositif qui s’adresse à 350 personnes « vise à faire entrer les migrants dans le droit commun », précisait Les Inrockuptibles en mars : accès à la Couverture maladie universelle ou à l’Aide médicale d’Etat, scolarisation des enfants, accompagnement vers l’emploi et l’obtention d’un logement. Là encore, les perspectives de travail manquent. Des ateliers emploi ont bien été mis en place et une quinzaine d’autorisations provisoires de séjour ont ouvert droit à l’emploi. Mais le retour au pays est envisagé : « Suite à un voyage sur place en septembre 2012, municipalité et associations réfléchissent à un système de “coopération décentralisée”. Des accords entre collectivités territoriales permettraient alors aux Roms, citoyens roumains, de monter des projets professionnels… dans leur propre pays », précise Les Inrockuptibles. « On peut reconnaître que Dominique Voynet a essayé de faire quelque chose. » Même si la Mous « ressort plus de la charité que de la solidarité républicaine », rajoute Juliette Prados, une élue locale (Parti de Gauche) dans les colonnes de l’hebdomadaire.
Orly : impliquer les populations dans la construction de leur habitat
En 2011, « avec l’appui du Conseil général, la mairie a installé sur des terrains des maisons en bois plus ou moins auto-construites et organisé un accompagnement des populations. Il y a une volonté de faire des choses », souligne Laurent El Ghozi de RomEurope. Le département du Val-de-Marne a en effet financé des maisons en kit basse consommation pour 17 familles sur un terrain prêté par la mairie pour au moins trois ans. Ces 75 personnes auraient été sélectionnées parmi les 150 habitants des bidonvilles insalubres d’Orly et de Villeneuve-le-Roi, selon un critère d’ancienneté.
Lyon : contre la ghettoïsation
C’est là que le drame s’est passé et pourtant. « Avant le changement de gouvernement, le préfet a accepté avec une relative bienveillance – je dis bien relative – les demandes de travail (1). Et l’association Alpil (Action pour l’insertion par le logement, ndlr) s’est battue pour que les populations accèdent à un logement en diffus. C’est-à-dire que les gens soient logés dans du logement social. Lyon prouve que c’est possible avec la conjonction de la bonne volonté du préfet et de quelques employeurs qui ont besoin de cette main-d’œuvre », souligne Laurent El Ghozi. La ville essaimera-t-elle ces embryons de bonnes pratiques ? En tout cas, elle fait partie de l’Alliance européenne des villes et des régions pour l’inclusion des Roms qui permet aux collectivités d’échanger autour de leurs expériences et pratiques.
(1) Contrairement aux autres populations européennes, ces deux nationalités sont en effet soumises à un régime transitoire jusqu’à la fin de l’année. Aussi pour employer un Roumain ou un Bulgare, un employeur doit-il obtenir [une autorisation auprès de la Préfecture. Les associations dénoncent la longueur du traitement des dossiers par la préfecture.
Et ailleurs ?A Agia Varvara, localité en banlieue d’Athènes, 3 000 Roms vivent, bien intégrés à la vie locale. Là,« ils ont leur quartier, leurs maisons, ils vivent selon leurs coutumes et font prospérer leurs commerces », précise un article du Parthenon Post, le journal-école du Centre de formation des journalistes. Même si la crise fait monter la xénophobie. |
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