15 janvier 2014

Le ministère de la Ville a signé le 14 janvier 2014 une convention-cadre avec l'Association des maires de France (AMF), entérinant ainsi plusieurs engagements avec les principaux acteurs de la politique de la Ville. Y sont réaffirmés l'intervention partenariale, le resserrement de la géographie prioritaire et la mobilisation du droit commun. Etat et élus locaux se sont également engagés à définir un schéma local de services aux publics d’ici à 2020, afin de mieux répondre aux besoins et aux attentes des habitants des quartiers populaires.
H. Soutra | | Publié le 14/01/2014
Alors que débutait l’examen de la réforme de la politique de la ville au Sénat [1], le ministère de la Ville a obtenu le 14 janvier la signature d’une convention-cadre avec l’Association des maires de France (AMF) [2].
Cheville ouvrière - Au moment de parapher cet engagement mutuel impliquant les principaux acteurs de la politique de la Ville, le ministre François Lamy comme le président Jacques Pélissard n’ont cessé de rappeler le rôle primordial joué par les maires en tant que « chevilles ouvrières de la politique de la ville » et « garant de la cohésion sociale » de leur territoire.
Le ministère s’engage d’ailleurs à « conforter le rôle des maires et du président de l’EPCI dans le respect des compétences de chacun et de la concertation locale qui présidera à l’élaboration du contrat de ville. »
Schématiquement, la charge revient :
  • aux mairies de coordonner opérationnellement les interventions des différents partenaires ;
  • aux intercommunalités de confectionner des diagnostics territoriaux et de mobiliser des politiques publiques telles que le développement économique ou la mobilité afin de réintégrer ces quartiers aux dynamiques d’agglomération ;
  • à l’Etat, enfin, d’entraîner les différents ministères, les régions, les départements et les autres opérateurs dans le financement de la politique de la ville.
Il importait qu’à l’occasion de la refonte de la politique de la Ville, le gouvernement resitue et précise le rôle du principal trio d’acteurs dans l’élaboration et la mise en œuvre de la politique de la Ville (lire notre encadré [3]).
Si elle se félicite de la « la sécurisation du rôle des élus locaux », la vice-présidente de l’AMF, sénatrice et présidente de Valenciennes Métropole Valérie Létard (UDI) avertit le ministre de la Ville : « si vous avez besoin du bloc communal dans la mise en œuvre de votre politique, nous avons besoin du soutien financier et stratégique de l’Europe, de l’Etat, des régions et des départements. »

Priorisation partenariale - Alors que le projet de loi présenté par François Lamy devrait bel et bien être promulgué courant février soit avant les élections municipales, la refonte de la géographie prioritaire [4] sera, elle, dévoilée non plus en avril mais en juin prochain.
La raison de ce délai supplémentaire se trouve aux pages 9 et 10 de la convention-cadre : suite au repérage ministériel des 1 300 territoires concentrant le plus de populations à bas revenus, un aller-retour devra être organisé avec les acteurs du bloc communal via les préfets, avant toute publication des périmètres définitifs des futurs quartiers prioritaires par décret.
Le dispositif de veille active proposé aux communes sortant de la géographie prioritaire, que l’AMF s’engage à suivre, devrait se traduira par la signature de contrats de ville identiques (mais sans accès aux fond prioritaires), « une mobilisation renforcée de l’ensemble des politiques publiques, le maintien jusqu’à leur terme et ce quel que soit leur date de signature des contrats des adultes-relais, ainsi qu’une pérennisation du cadre des programmes de réussite éducative. »
Soutien aux collectivités - Suite au report de publication de la liste des quartiers prioritaires, la signature des futurs contrats de villes alliant un volet humain au volet urbain pourra, elle, être repoussée jusqu’à mi-2015.
Le ministère de la Ville se charge d’« accompagner les territoires les moins bien dotés en matière d’ingénierie, d’observation et d’évaluation […] et de soutenir les acteurs locaux dans l’organisation et la structuration du contrat de ville. »
En contrepartie de cette aide, l’AMF dit enjoindre « les maires et les présidents de communautés pour qu’ils mobilisent leurs politiques – communales et intercommunales – de droit commun sur les quartiers prioritaires. »
Elle diffusera également les expériences innovantes et autres bonnes pratiques, organisera des rencontres et, éventuellement, des ateliers spécifiques lors du Congrès des maires 2014 ainsi que des séances de formation à destination de ses membres en 2014 et 2015.
Services aux publics - La convention stipule que le ministère de la vile comme le bloc communal doivent, dans le cadre des contrats de ville, cartographier les besoins des habitants des quartiers en matière de services aux publics et la réalité de l’offre existante. Objectif ? Qu’Etat, collectivités territoriales, opérateurs publics ou privés chargés de missions de service public ou acteurs privés de proximité puissent les renforcer d’ici 2020.
François Lamy et ses équipes ont également promis de « mobiliser l’administration territoriale de l’Etat autour du préfet, pour convoquer les politiques de droit commun des différents ministères et soutenir l’implication de l’ensemble des acteurs concernés par la politique de la ville […] A cet égard, l’AMF se félicite des conventions que le ministère a signé avec différents départements ministériels » peut-on lire dans ce texte.
Les priorités des élus locaux concernent l’éducation, la santé, l’emploi ainsi que la sécurité et la prévention de la délinquance.
Appel au rééquilibrage - « En province, les maires de banlieues se sentent parfois seuls. Nous sommes accusés de réclamer constamment de l’argent, mais nous souhaitons simplement que nos habitants soient traités avec égalité. Sans vouloir rajouter de bidule ou de machins, il faudra une structure qui suive concrètement, territoires par territoires, les sommes fléchées vers les quartiers populaires » a réclamé Gilles Leproust (PCF), maire d’Allonnes et vice-président de l’AMF, à l’issue de la conférence de presse.
La maire de Bron, également vice-présidente de l’AMF, Annie Guillemot (PS) a pour sa part appelé l’Etat a joué « son rôle en faveur d’un rééquilibrage. Il faut pouvoir compter sur le droit commun à la base, avant d’avoir hypothétiquement recours à des enveloppes exceptionnelles de réparation comme la politique de la ville. »

Consensus global sur l’articulation mairie / intercommunalité

En signant des conventions-cadres avec les principales associations d’élus locaux dont l’AMF, le ministre délégué à la Ville semble avoir réussi son pari en matière de gouvernance locale. Ce n’était pourtant pas gagné.
A l’issue de l’examen de son projet de loi par l’Assemblée nationale, François Lamy ne cachait d’ailleurs pas sa crainte à-propos de la répartition des rôles entre présidents d’EPCI et maires.
« Les sénateurs-maires seront plus sensibles que les députés sur le transfert de la compétence « politique de la ville » à l’intercommunalité » anticipait-il à l’époque, refusant néanmoins d’établir un parallèle avec le transfert polémique des plans d’urbanisme locaux (PLU) aux intercommunalités [5].
Partage des tâches - « Alors que le PLUI supprimait les pouvoirs du maire, notre réforme l’associe encore grandement : le transfert a simplement pour but que les intercos s’occupent du côté « hard » de la politique de la ville – diagnostic du territoire, questions de peuplement à travers l’offre d’habitat, désenclavement – laissant, de fait, le travail « soft » aux maires, à savoir le soutien aux associations, le suivi de proximité, etc…» détaillait le ministre de la Ville, dans un exercice de câlinothérapie.
Malgré plusieurs mois de retards par rapport aux contractualisations précédentes entre le ministère de la Ville et les différentes associations d’élus locaux (ARF, AdCF, Ville et Banlieue, FVM, ADF, AMGVF et ACUF) [6], François Lamy comme Jacques Pélissard, président de l’AMF ont assuré qu’ils n’avaient eu aucun désaccord au moment de signer cette convention-cadre.
Problèmes d’agenda - « Nous avons une tête et deux bras et avons travaillé en fonction du rythme des uns et des autres : l’AMF a eu beaucoup de travail entre l’organisation du congrès des maires ou les dossiers sur les finances locales et les métropoles, tandis que les effectifs du ministère ne sont pas pléthoriques » a justifié le ministre de la Ville.
Si la signature avec l’AMF est intervenue en dernier à quelques semaines seulement des élections municipales, ce serait donc seulement pour une question d’agenda chargé… et de symbolique.
« C’est logique qu’on finisse par les maires, le travail sur les conventions et les engagements qu’elles sous-entendent est tout de même plus conséquent pour les acteurs opérateurs, qui mettent en application au quotidien cette réforme, et les acteurs simples financeurs comme les ministères ou les départements et régions » explique pour sa part Valérie Létard, présidente de Valenciennes Métropole et vice-présidente de l’AMF.
REFERENCES


CHIFFRES CLES

  • A niveau de qualification égale, le taux de chômage est plus de deux fois plus élevé en Zus(24,2%) qu’ailleurs (10,1%) selon le dernier rapport ONZUS 2012;
  • 36,5% des habitants des Zus vivent en-dessous du seuil de pauvreté soit un taux deux fois et demi plus élevé que dans les autres territoires.
    Par ailleurs, c’est un enfant sur 2 qui vit dans une famille pauvre ;
  • 11,6% des jeunes résidents en Zus ne sont ni en emploi ni en formation, un taux qui atteint 16% pour les jeunes diplômés.
  • Le taux de délinquance est toutefois moins élevé dans les zones urbaines sensibles (49,7 faits pour 1 000 habitants) que dans les circonscriptions de sécurité publique environnantes (55,0 faits pour 1 000 habitants).


Aucun commentaire: