7 février 2015

Grand Paris en grande couronne : les intercommunalités « XXL » divisent les élus

La Gazette   Emmanuel Guillemain d'Echon |  Publié le 05/02/2015
Après l’échec du giga-groupement autour de Saclay, les élus ont, le 5 février 2014, refusé le compromis porté par le préfet autour du projet de Grand Evry. La constitution d’un ensemble autour de Roissy suscite des interrogations.


Coup de théâtre ce matin à la Commission régionale de coopération intercommunale (CRCI), chargée de préparer la refonte de la carte intercommunale dans la grande couronne parisienne.
Alors que le préfet de la région Île-de-France, Jean Daubigny, avait accepté de diviser en deux la super-intercommunalité s’étendant d’Arpajon à Sénart, ce sont les élus des Yvelines et du Val-d’Oise qui ont fait capoter le compromis en s’abstenant massivement lors du vote de l’amendement présenté par le préfet (17 abstentions et un vote pour dans les Yvelines, 7 abstentions et 7 pour dans le Val-d’Oise).

Ils n’étaient pourtant pas concernés directement, puisque l’ensemble de plus de 533 000 habitants, dessiné par le préfet le 28 août 2014 dans sa proposition de nouveau schéma régional de coopération intercommunale (SRCI), se trouve en grande partie sur le territoire de l’Essonne, avec une portion en Seine-et-Marne – les élus de ces départements ont d’ailleurs voté pour l’amendement préfectoral à la quasi-unanimité.
Dans les instants qui ont suivi le vote, la stupeur et l’incompréhension étaient palpables dans l’assemblée, dont certains membres ont demandé une suspension de séance.
Jeu complexe - « Je ne comprends pas les élus des Yvelines, ils n’ont pas joué le jeu. C’est de l’infantilisme ! », s’emporte Jérôme Guedj (PS). Un jeu complexe, car selon les termes de la loi Maptam (1) [1], pour adopter un amendement au SRCI, la commission doit l’adopter à la majorité qualifiée des deux-tiers, plus la même majorité au sein de chaque département concerné.
« En fait, il faut s’assurer quasiment l’unanimité des membres de la CRCI pour adopter un amendement », explique Patrice Girot, président de la section Ile-de-France du Syndicat national des directeurs généraux des collectivités territoriales (SNDGCT).
Et si les élus des Yvelines ont su mobiliser leurs collègues, le 22 janvier, pour démembrer l’autre projet de super-intercommunalité autour du plateau de Saclay, ils ont, semble-t-il, oublié de renvoyer l’ascenseur.
Pierre Bédier, président UMP du conseil général et directement visé par les accusations de plusieurs élus, hausse les épaules : « C’est la loi qui est mauvaise, leur majorité qualifiée leur retombe dessus ! »
Il pourrait également s’agir d’une tentative de gagner du temps, alors que les élections départementales de mars risquent de changer la donne au sein de la CRCI, et que le préfet doit arrêter le SRCI avant le 31 mai.
« On remet les compteurs à zéro, et on attend une nouvelle majorité ! », sourit Jean-Pierre Bechter, maire UMP de Corbeil-Essonnes et l’un des trois élus essonniens ayant voté contre l’amendement du préfet.
La revanche du préfet de région ? - Les abstentionnistes du Val-d’Oise, quant à eux, ont essentiellement protesté contre la perspective du rattachement de la communauté d’agglomération des Portes de l’Essonne à la métropole du Grand Paris – qui devrait être rendue possible par le projet de loi NOTRe.
« Si on laisse Orly partir dans la métropole, Roissy partira aussi. Ce serait la ruine du département ! Elle nous a déjà pris Argenteuil, c’est pour ça qu’on leur a envoyé ce missile : on ne marche pas dans la combine ! », se réjouit Hugues Portelli, sénateur-maire UMP d’Ermont, qui a refusé de prendre part au vote.
Le préfet a finalement décidé de renvoyer l’examen des autres amendements – et notamment ceux concernant le troisième « point chaud » du SRCI, autour du Grand Roissy – à la semaine prochaine, le 12 février, histoire de donner une « nouvelle chance » aux élus pour se mettre d’accord. Il devrait également déposer à nouveau l’amendement concernant les futurs EPCI de l’Essonne.
D’humeur affable au début de la séance, Jean Daubigny a haussé le ton : en cas d’impossibilité d’obtenir le quorum nécessaire à la tenue de la réunion, il prendra la décision d’arrêter le SRCI en l’état – au grand dam des élus essonniens et seine-et-marnais.


Révision des intercommunalités d’Ile-de-France : un ensemble de 800.000 habitants repoussé
Les agglomérations de la grande couronne francilienne ont repoussé jeudi 22 janvier le projet de création d'un ensemble "démesuré" de 800.000 habitants à cheval sur les Yvelines et l'Essonne, dans le cadre de la révision des intercommunalités d'Ile-de-France, a-t-on appris de sources concordantes.
Les élus de Seine-et-Marne, du Val-d’Oise, des Yvelines et de l’Essonne qui siègent au sein de la Commission régionale de la coopération intercommunale (CRCI) ont voté « à l’unanimité » des présents, moins deux abstentions, une « proposition de modification » de ce projet, ont fait savoir les agglomérations de Versailles Grand Parc et Saint-Quentin-en-Yvelines, directement concernées, dans des communiqués.
La loi MAPTAM, qui a créé la Métropole du Grand Paris, impose en contrepoids qu’en dehors de Paris et de la petite couronne toutes les communes franciliennes soient intégrées dans des Etablissements publics de coopération intercommunale (EPCI) d’au moins 200.000 habitants.
Dans ce cadre, le préfet de Région Ile-de-France, Jean Daubigny, avait proposé un nouvel EPCI qui regrouperait 57 communes de l’ouest de la région: les agglomérations de Versailles Grand Parc, Europ’Essonne, Plateau de Saclay et Saint-Quentin-en-Yvelines.

Ce nouvel ensemble proposé comme base de travail par la préfecture aurait été, avec 800.000 habitants à cheval sur l’Essonne et les Yvelines, le plus important EPCI d’Île-de-France, après la métropole du Grand Paris.

« Démesuré » et « incohérent » – Les élus, qui ont jugé cet ensemble « démesuré » et « incohérent », ont voté en faveur d’une division en « trois ECPI à taille humaine », dépassant chacune le seuil de 200.000 habitants. Une seule intercommunalité à 800.000 habitants aurait représenté « la taille d’un gros département », ont fait valoir les élus concernés dans leur amendement.
Deux autres « mastodontes », selon les mots du rapporteur général de la CRCI, le maire (SE) de Limours Jean-Raymond Hugonet, sont également contestés. Dans l’Essonne, le projet d’un « Grand Évry » qui irait de l’Arpajonnais jusqu’à Sénart en passant par Corbeil, soit 530.000 habitants froisse des susceptibilités historiques.

Le troisième « point chaud » est le « Grand Roissy » (plus de 340.000 habitants), qui comprendrait des EPCI du Val-d’Oise et certaines communes de Seine-et-Marne détachées d’EPCI existantes.
Les amendements à la carte des intercommunalités d’Ile-de-France seront débattus jusqu’en février, pour une adoption de la nouvelle carte au 28 février.

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