2 mai 2014

Dans une lettre aux maires, Najat Vallaud-Belkacem livre sa feuille de route

dans La Gazette le 28/04/2014   • Par Hugo Soutra
Dans une « Lettre aux maires » dont les communes sont ciblées par la politique de la ville envoyée vendredi 25 avril et diffusée ce lundi 28, Najat Vallaud-Belkacem revient sur les actions menées par le gouvernement et notamment la loi Ville et Cohésion urbaine votée en février dernier. La nouvelle ministre à la Ville passe en revue les différentes échéances à venir, pour elle comme pour les édiles locaux, sans faire d’annonces novatrices.

Vous venez d’être élu(e) ou réélu(e) maire d’une commune engagée dans l’un des 2 500 contrats urbain de cohésion sociale (CUCS) ? Alors avez-vous dû recevoir un courrier, envoyé le 25 avril par le biais des préfets, émanant de la nouvelle ministre à la Ville, Najat Vallaud-Belkacem. Au cas où vous ne l’auriez toujours pas reçu, la Gazette des communes l’a néanmoins lu pour vous.

Si elle ne procède pas à de nouvelles annonces, l’ancienne porte-parole du gouvernement y réaffirme sa volonté d’engager « sans attendre » la réforme de la politique de la ville.  
Cela « commence par la réforme de la géographie prioritaire », symbole de la concentration des efforts de l’Etat sur un nombre restreint de territoires en proie à de grandes difficultés sociales. Après l’engagement d’un dialogue à la fin du mois de mai entre les municipalités concernées et les préfets, Najat Vallaud-Belkacem arrêtera « à l’automne, la liste définitive et le périmètre précis des 1 300 quartiers prioritaires. »


Place à l’interministériel - Conformément à un des grands principes établis par son prédecesseur François Lamy en matière de financements, la ministre accordera la priorité aux politiques de droit commun avant de débloquer les crédits spécifiques du ministère de la ville. La raison ? « Contrairement à une idée reçue, on en fait souvent moins dans ces quartiers qu’ailleurs. »
« Les efforts engagés depuis deux ans [en termes d’emplois, de réussite éducative, de sécurité, de péréquation ou encore d’accès aux soins, à la culture ou aux équipements sportifs, ndlr] seront poursuivis et amplifiés, grâce en particulier à la mobilisation des préfets et aux partenariats avec les grandes associations d’élus pour que toutes les collectivités publiques y prennent leur part. »

Le fléchage de ce droit commun devrait d’ailleurs être l’un des principaux enjeux de la préparation des contrats de ville – remplaçants sur la période 2014/2020 des contrats urbains de cohésion sociale (CUCS) – qui « sera engagée dès le mois de juin. »
Administrations déconcentrées, opérateurs de l’Etat et collectivités territoriales seront donc associés à ces négociations menées par les communes et les intercommunalités. En complément, certaines entreprises et les associations pourront également y prendre part via des « partenariats triangulaires » signés avec les collectivités.


Avec les assos, le CNV et les habitants ? - Cette fois-ci, la société civile issue des quartiers prioritaires ne devrait théoriquement plus être mise au ban. Dès la semaine prochaine, « je demanderai aux administrations publiques de faciliter le développement des initiatives associatives, pour passer d’une culture du Contrôle à une culture du Faire. »
Le Conseil national des villes (1) « sera refondé dans les prochaines semaines pour accueillir en son sein un collège des habitants et associations de proximité. »

« La politique de la ville ne peut réussir si elle se contente d’être une politique de dispositifs construits à Paris et plaqués sur un territoire. Vous le savez mieux que quiconque, c’est le quartier et ses habitants qui doivent constituer l’aiguillon pour transformer l’action publique sur un territoire », écrit ainsi Najat Vallaud-Belkacem à propos de la participation citoyenne.

Expérimentation des budgets participatifs - « Nous aurons à mettre en place des conseils citoyens dans les tous prochains mois pour qu’ils puissent participer à la construction des contrats de ville », insiste la ministre : il faudra alors faire vite pour que la co-construction entre collectivités et citoyens prévue par François Lamy en son temps soit effective. Or, rien ne contraint, à l’heure actuelle, les collectivités à créer, d’ici juin, ces conseils citoyens.
Toujours dans la philosophie de l’ambitieux rapport Mechmache/Bacqué, elle dit également son souhait de « promouvoir et assurer une logique  d’expérimentation. » Prenant l’exemple des budgets participatifs, la ministre de la Ville demande que l’on « détermine les conditions de leur réussite et la possibilité d’une généralisation. »

« Désenclaver les esprits » - Par ailleurs, le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) « que je présenterai avant l’automne » a pour ambition de remettre en mouvement les habitants et « de créer une vie collective aussi harmonieuse que possible. » Pour Najat Vallaud-Belkacem, la rénovation urbaine « doit nous permettre de désenclaver les quartiers pour mieux désenclaver les esprits. »
Rebondissant sur l’idée émise par son prédécesseur François Lamy lors d’un discours devant les délégués territoriaux de l’ACSé à l’automne 2013, elle propose que soit remis « avant l’été un programme d’action pour une ville Durable qui mobilisera les moyens du programme d’investissements d’avenir. »

Recyclage d’annonces de Lamy - Sur le front de l’emploi, la ministre à la Ville recycle également le plan « Entrepreneurs des quartiers », présenté en conseil des ministres le 11 décembre 2013, déjà grâce au programme des investissements d’avenir. Comme prévu initialement avec la Caisse des Dépôts, une enveloppe de 600 millions d’euros permettra donc de « lever des investissements privés et co-investir dans des projets structurants comme des pépinières d’entreprises ou des maisons de santé » d’ici 2020.
Nouvelles implantations de Pôle Emploi et des missions locales au regard de la nouvelle géographie prioritaire, dispositifs de parrainage, développement de l’alternance, évaluation des emplois francs, etc. Dans l’objectif de « réduire de moitié l’écart (aujourd’hui de 18 points) de taux d’emploi entre les quartiers prioritaires et les autres territoires », la ministre détaille un éventail de mesures en faveur de l’emploi, afin de « créer les conditions d’une mobilisation systématique des outils de droit commun. »
Une réunion à la rentrée avec le ministre du Travail, Français Rebsamen, permettra de faire un point d’étape sur la convention signée entre les deux ministères.


Approche globale - Commentant sa lettre auprès de l’AFP, elle a indiqué que « rénover le cadre de vie ne suffira jamais si on y transpose les mêmes difficultés sociales. Il est nécessaire d’apporter du développement économique dans les quartiers, pour créer de l’activité et donc de la vie sur place. »
Au rang des potentielles mesures à venir, Najat Vallaud-Belkacem entend aborder le sujet des discriminations à l’embauche et dans l’emploi. Elle prévoit de discuter lors de la conférence sociale du printemps d’une forme de « class action » à la française, qui permettrait des actions collectives en lien avec les syndicats.
Promesses et sens de l’action publique - Selon elle, plus globalement, l’objectif des années à venir pour la politique de la ville est double.
  1. « Traduire sur le terrain les engagements présidentiels en faveur de la jeunesse, de la justice territoriale et de l’égalité républicaine […] le soutien à la jeunesse – principal levier économique, social, politique et culturel pour bâtir la société de demain et briser les mécanismes de ségrégation – constituera au même titre que l’égalité entre les femmes et les hommes et la lutte contre les discriminations, l’axe transversal et structurant des contrats de ville. »
  2. Disant savoir « combien la fonction de maire dans une commune de la politique de la ville est exigeante […] nous devons montrer à ces citoyens plus concernés que d’autres par les difficultés du quotidien et l’incertitude de l’avenir que l’action publique a un sens et des résultats concrets. »

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