22 février 2013

Politique de la ville

François Lamy détaille la réforme gouvernementale
Au lendemain du Comité interministériel des villes, qui s'est tenu le 19 février à Matignon sous la houlette du Premier ministre, François Lamy, ministre délégué chargé de la ville et principal instigateur de la réforme de la politique de la ville, revient sur les principales mesures adoptées et s'adresse aux collectivités locales.
Entretien.

Cinq ans après les annonces en grandes pompes du plan « Espoirs banlieues » de Fadela Amara et son échec retentissant, le gouvernement de François Hollande parviendra-t-il à redonner l’espoir aux habitants des quartiers pauvres ? C’est en tous cas la volonté exprimée le 19 février par le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, [2] lors d’un comité interministériel des villes très attendu – le premier depuis 2010, au cours duquel une série de mesures interministérielles, plutôt techniques, ont été annoncées.
Au programme : une géographie prioritaire resserrée, un nouveau contrat de ville piloté par les intercommunalités, le lancement d’une nouvelle série d’opérations de rénovation urbaine et l’amélioration de la péréquation.
Dans un entretien accordé à la Gazette, François Lamy, ministre délégué chargé de la ville, détaille les principales mesures de la réforme.

Dans un contexte de restriction budgétaire, comment convaincre les collectivités locales de mettre la main au pot ?

Toutes les collectivités ne sont pas impliquées dans la politique de la ville. A ce jour, par exemple, seul un tiers des départements a signé un contrat urbain de cohésion sociale (Cucs). Nous nous sommes donc rapprochés de l’Assemblée des départements de France pour que les conseils généraux soient tous signataires des futurs contrats de ville qui verront le jour en 2014.
Même démarche avec l’Association des régions de France qui s’est engagée à ce que les régions ciblent 10% des crédits européens vers les territoires prioritaires. En plus de leurs compétences, plus largement, j’appelle les collectivités à orienter leurs politiques publiques vers les quartiers en difficultés.

La géographie prioritaire va être resserrée. Combien de quartiers couvrira-t-elle ?

On dénombre aujourd’hui 2492 Cucs sur le territoire. Je peux vous l’affirmer : en 2014, il pourra toujours y avoir le même nombre de contrats de ville mobilisant le droit commun.
Cependant, dans le cadre de ces contrats, il faudra concentrer les moyens de la politique de la ville sur les quartiers prioritaires, c’est-à-dire ceux qui en ont le plus besoin, que nous estimons à 1000 environ. C’est la fin du saupoudrage. Je présenterai cette liste de quartiers prioritaires, vers la fin du mois de juin.

Des quartiers sortiront du zonage et de ses avantages. Quelle réponse apporterez-vous aux élus réticents ?

Des dispositifs transitoires seront mis en œuvre. Nous prendrons le temps nécessaire pour que les collectivités ne se retrouvent pas le dos au mur et puissent anticiper les décisions prises. Mais si des quartiers vont sortir de la géographie prioritaire, d’autres vont y entrer.
Nous allons très vraisemblablement voir apparaître des poches de pauvreté là où elles n’existaient pas. Je pense à certaines villes moyennes comme Guéret dans la Creuse qui n’était pas jusque-là en politique de la ville.
Nous engagerons ensuite des négociations au cas par cas dans le but de pondérer l’action de l’Etat selon la richesse des collectivités.

Où en est le volet « péréquation » de la réforme ?

Cette réflexion engage différents ministères et doit être articulée avec l’ensemble des mesures budgétaires prises par le gouvernement. La mission que j’ai confiée au député François Pupponi pour améliorer les outils de péréquation se poursuit et trouvera sa place lors des débats attendus autour du projet de loi sur la décentralisation ainsi que lors des discussions pour le budget 2014. Mais c’est une certitude : il faut rendre les politiques de péréquation plus justes et plus adaptées au territoire.

Quelles sont les pistes de réflexion ?

Une réflexion doit être menée sur la DSU-cible. Quant à la dotation de développement urbain (DDU), destinée aux communes les plus pauvres, nous publierons prochainement une circulaire afin de la déplafonner et lui donner une plus grande souplesse d’action. En permettant notamment aux communes les plus pauvres d’y recourir pour financer des dépenses de fonctionnement, ce qui n’est pas possible aujourd’hui.

Qu’en est-il du financement du programme national de rénovation urbaine ?

J’ai rencontré la semaine dernière le président d’Action Logement. Les discussions se poursuivent et devraient déboucher dans les toutes prochaines semaines. Je suis plutôt confiant.
Le financement du PNRU 1 est sécurisé pour les trois prochaines années. Et comme l’a annoncé le Premier ministre lors du CIV, l’échéance du PNRU sera reportée à fin 2015 pour les opérations qui n’auront pu être engagées avant fin 2013.
Parallèlement, une nouvelle génération d’opérations de rénovation urbaine sera lancée en 2014 et intègreront les contrats de ville. Cette nouvelle série d’opérations sera basée sur une liste nationale et non plus un appel à projets.
Il nous faut également profiter de cette opportunité pour nous pencher sur les politiques de peuplement, chantier essentiel pour améliorer la mixité sociale dans les quartiers.

La réforme de la politique de la ville fera l’objet d’une loi. Quel est votre calendrier ?

Le calendrier parlementaire est très chargé. Mais j’espère pouvoir présenter le texte au cours du printemps. Ce sera un texte court. Nous souhaitons que les élus puissent disposer de tous les outils avant la fin de l’année afin de pouvoir contractualiser au lendemain des élections municipales de 2014.

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