SUD OUEST le 04/01/2013
Par DOMINIQUE RICHARD
Les contrats de partenariat public-privé permettent à l'État et aux collectivités de ne pas tenir compte de leur endettement. Attention au réveil.
Et un PPP de plus ! Le 19 décembre dernier, le tribunal administratif de Bordeaux a débouté les opposants au grand stade et validé le montage retenu par la municipalité d'Alain Juppé. Déduction faite des subventions allouées par l'État, la Région Aquitaine, la Communauté urbaine et la Ville, l'équipement sera financé, construit et géré par le groupement Vinci-Fayat pendant une durée de trente ans, le temps pour la commune de Bordeaux de rembourser les deux majors du BTP.
En quelques années, la France est devenue la championne d'Europe des contrats de partenariat public- privé, plus connus sous le sigle PPP. Depuis 2004, près de 41 milliards d'euros ont ainsi été engagés. La crise ne freine pas leur essor. Rien que pour le premier semestre 2012, 3,1 milliards d'euros supplémentaires ont été signés. De la ligne TGV Tours-Bordeaux au palais de justice de Paris en passant par les dernières prisons et le nouveau ministère de la Défense, la vague des PPP n'en finit pas d'enfanter des chantiers.
En quelques années, la France est devenue la championne d'Europe des contrats de partenariat public- privé, plus connus sous le sigle PPP. Depuis 2004, près de 41 milliards d'euros ont ainsi été engagés. La crise ne freine pas leur essor. Rien que pour le premier semestre 2012, 3,1 milliards d'euros supplémentaires ont été signés. De la ligne TGV Tours-Bordeaux au palais de justice de Paris en passant par les dernières prisons et le nouveau ministère de la Défense, la vague des PPP n'en finit pas d'enfanter des chantiers.
Chantiers à crédit
Les PPP, qui permettent de confier à un privé la construction et la gestion d'un équipement public en contrepartie du paiement d'un loyer pendant la durée du contrat, présentent un immense avantage. Ils conjurent la fatalité des chiffres en favorisant l'étalement des remboursements sur plusieurs décennies. Une aubaine pour un État asphyxié par les déficits et des collectivités locales souvent endettées. En cas de dérive financière, les ministres et les élus concernés ne seront plus en poste pour répondre de leurs choix.
En 2011, la commune girondine de Saint-Laurent-Médoc avait envisagé d'édifier un groupe scolaire en privilégiant cette option. Il n'est pas certain qu'elle respectait les critères de l'ordonnance 2004 qui encadre le recours aux PPP. Ceux-ci ne peuvent a priori être retenus qu'en cas d'urgence ou de particulière complexité du projet. Et ce choix doit s'appuyer sur une analyse comparative démontrant qu'en matière de performance, de coût global et de partage des risques, la solution PPP est plus pertinente qu'un marché public traditionnel.
En la matière, il n'existe pas de véritable jurisprudence. Les tribunaux disposent d'une grande marge d'appréciation, même si le récent arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux a marqué les esprits. La juridiction a annulé la délibération prise en 2008 par le Conseil municipal de Biarritz. Celui-ci avait autorisé le maire à signer un PPP pour la construction de la Cité du surf et l'extension du musée de la Mer, un projet dont le degré de complexité ne justifiait pas selon les juges la mise en œuvre d'un tel montage.
Retards et dérapages
Une étude récente menée par l'Institut d'administration des entreprises de Paris-Sorbonne ensevelit les PPP sous les louanges. Qu'il s'agisse du coût des travaux, des charges d'exploitation, des délais de réalisation ou des possibilités de renégociation, l'indice de satisfaction des ministères et des collectivités locales concernées serait supérieur à 90 %. En ne séparant plus l'investissement du fonctionnement, les PPP permettent aux maîtres d'ouvrage de mieux définir leurs besoins. Ce qui évite souvent des retards et dérapages, à l'image des dépassements de budgets de l'ordre de 10 à 20 % fréquemment observés après des appels d'offres classiques.
Reste que les dessous des PPP ne sont pas toujours très affriolants. En 2009, les surveillants de la nouvelle prison de Roanne édifiée par Eiffage dénonçaient des finitions bâclées et des équipements low-cost. Et que dire du nouvel hôpital de Corbeilles-Essonnes, œuvre encore d'Eiffage. L'établissement, plombé par les malfaçons, devra verser chaque année à l'entreprise un loyer de 46 millions au lieu des 30 initialement prévus.
L'inconnue financière
Difficile pourtant d'expliquer ces écarts de conduite par la seule incapacité des élus et des décideurs à maîtriser un outil novateur. En 2011, un rapport de la Cour des comptes relevait qu'en matière de PPP pénitentiaires, la gestion publique était moins onéreuse que la gestion privée. Il y a quelques semaines, un audit de l'Inspection générale des finances a évalué à 25 % le surcoût des constructions en partenariat public-privé. Et qu'en sera-t-il dans trente ou quarante ans, lorsque les contrats arriveront à leur terme ?
Le 13 décembre dernier, lors du débat organisé par l'observatoire des PPP de Sciences Po Bordeaux, aucun des interlocuteurs présents n'a été en mesure de chiffrer la charge supplémentaire supportée par le contribuable du fait des PPP. Elle n'est guère contestable. Les opérateurs privés empruntent non seulement des capitaux à des taux beaucoup plus élevés que les collectivités ou les établissements publics, mais leurs prestations intègrent aussi les marges bénéficiaires exigées par des actionnaires de plus en plus gourmands. Alléchés par la manne des PPP, Vinci, Bouygues et Eiffage, les majors du bâtiment, raflent la grande majorité des contrats au détriment des PME qui composent le tissu économique local
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